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20 décembre 2012 4 20 /12 /décembre /2012 19:21

 

Les tueries scolaires ou School shootings


Les États-Unis se sont fait une spécialité du school shooting, la tuerie commise dans un établissement scolaire par un ou plusieurs jeunes qui, le plus souvent, y sont ou étaient scolarisés (exemples :  le massacre à la Columbine High School dans le Colorado le 20 avril 1999, qui fit 13 morts plus les deux tueurs âgés de 18 ans [Dylan Klebold et Eric Harris] qui se suicidèrent ou, le 14 décembre 2012, le massacre au fusil d’assaut de 20 enfants et 6 femmes dans une école primaire de Newton dans le Connecticut par un jeune âgé de 20 ans [Adam Lanza] qui se suicida également).

 

 

En Europe, l’Allemagne est le pays le plus touché (ex. : le massacre d’Erfurt le 26 avril 2002 où 16 personnes périrent sous les tirs de Robert Steinhaüser, un élève de 19 ans expulsé de son lycée, qui se suicida).

 

Une recherche avait précisément été conduite en 2012 sur ce délicat sujet au sein du Master 2 de Criminologie de l'université Panthéon-Assas (Paris 2). Elle a été publiée aux éditions L'Harmattan (auteur : Melle Ilana Lachkar). L'actualité nous incite à revenir sur ce thème.


Le school shooting (qui a également connu quelques illustrations en Grande-Bretagne) bénéficie d’une forte couverture médiatique où sont parfois évoqués des traits de la personnalité ou des attitudes qui seraient typiques des school shooters. Ce seraient des êtres froids et insensibles de type psychopathe voire des schizophrènes, des adeptes de jeux vidéo violents ou de musique hard rock, des introvertis vêtus de façon sinistre ou « gothique », moqués et ostracisés par leurs camarades, etc.

 

Cette présentation est simpliste.


De façon plus méthodique, le Secret service fédéral américain a réalisé en 2002 une étude (Safe school initiative) analysant 37 faits divers de ce genre, impliquant 41 criminels, commis entre 1974 et 2000 (USSS Safe School Initiative : An Interim Report on the Prevention of Targeted Violence in Schools, mai 2002 : http://www.secretservice.gov/ntac_ssi.shtml).


La conclusion est qu’il est difficile de dresser un profil-type pour identifier les individus à risques.

 

Mis à part que ce sont toujours des jeunes de sexe masculin et toujours âgés de 11 à 21 ans, ces criminels diffèrent largement les uns des autres.

 

Beaucoup ont vécu dans une famille unie, obtenu de bons résultats scolaires sans aucun problème de discipline, noué des relations sociales et amicales ordinaires. Ils ne consommaient pas de substances illicites et la grande majorité n’avait pas de trouble mental diagnostiqué (sous réserve d’un état dépressif et suicidaire avéré). C’est une minorité d’entre eux qui a manifesté un intérêt pour des jeux, films ou romans violents. Il est donc vain d’entreprendre un profilage (profiling) des school shooters.


En revanche, il existe toujours des signes avant-coureurs. Le school shoting est un acte planifié par avance et rarement impulsif. Bien plus, il est souvent apparu a posteriori que d’autres personnes (des camarades ou les parents auxquels le futur tueur envoyait des signaux explicites) savaient que le massacre pouvait se produire mais n’en ont pas alerté les autorités (il est même arrivé que certains viennent assister au "spectacle" prévisible). En revanche, il est fréquent qu’un tiers adulte se soit inquiété du comportement du futur tueur (un conseiller d’éducation, un parent d’élève, un professeur inquiet de lire des poèmes morbides…).


Si les school shooters ne menacent pas préalablement leurs futures victimes, ils ruminent de sombres pensées. Par le passé, ils ont très mal vécu des échecs personnels, souffert d’un défaut physique, connu une douleur sentimentale (perte d’un être cher, déception amoureuse, maladie d’un proche) ou la perte d’un statut (licenciement d’un premier job). Dépressifs, ils ont très souvent envisagé ou même tenté de se suicider (un élément très préoccupant car le suicidaire narcissique veut être accompagné d’autres personnes dans la mort). En outre, ils se sont sentis persécutés, agressés ou insultés par leurs camarades ou par un membre du personnel de l’établissement (qui deviennent ensuite les cibles prioritaires des coups de feu mais pas seulement). La première motivation de leur acte est la vengeance ou la quête de reconnaissance.


Les médias ont souvent constitué pour ces sujets une source d’inspiration : beaucoup de tueurs dirent d’ailleurs s’être inspirés d’un précédent school shooter ! Indépendamment des reportages et de la presse, la télévision, le cinéma, les jeux vidéos et des sites internet alimentent leur fascination pour la violence.

 

Dans un ordre d’idées voisin, la prise de médicaments (stimulants, antidépresseurs, antipsychotiques ou calmants) apparaît très fréquemment. Le déchaînement subit de violence ainsi que le regard froid et vide d’émotion du school shooter s’expliqueraient par l’absorption de ces susbtances abusivement prescrites aux enfants aux USA (notamment la Ritalin, un stimulant consommé par 6 millions d’enfants réputés hyperactifs).


Bien sûr, les tireurs ont eu accès à des armes. Souvent même, des camarades les ont aidés à organiser leur projet (notamment à acquérir une arme), même s’ils l’ont mis seuls à exécution.

 

Sur la base de ces constats, des conseils de prévention ont été formulés (par exemple, de lutter contre le harcèlement et les violences scolaires qui nourrissent le ressentiment des school shooters). Un CD-Rom interactif a été distribué dans les écoles américaines.


Mais les school shooters concentrent également des maux qui affectent la société où ils vivent (l’apologie de la violence dans les médias, le harcèlement scolaire, la solitude, la disponibilité des armes à feu…).


 

 

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